SANS COMPROMIS...
Le roman 2007 de Thierry Tuborg résume
en partie son parcours. Un écrivain issu du milieu rock, décide
de doubler son éditrice qui le méprise ; transposant dans
la littérature le principe du film sur les Pistols, "la grande escroquerie
du rock'n'roll" (*). Ce qui donne une histoire décapante sur les
moeurs éditoriales, où l'on croise en 1975 le fantôme
de Dee Dee Ramone, où l'on trinque au Code Bar, entre l'évocation
d'un concert des Dogs et le label référentiel actuel, Lollipop.
"J'avais toujours considéré "compromis" comme un mot inachevé
qui se devait comprendre comme "compromission"". C'est d'une logique électrique,
venant de celui qui fut à la fin des 70's bordelaises, le meneur
historique de Stalag. Aujourd'hui à Montpellier, il publie avec
Stalingrad "Loseland".
ACIDE-Cet album 14 titres sonne punk rock
à la Ramones/Stooges pour la compo et le son, avec des paroles à
l'efficacité aussi juste qu'apparemment simple. Chanter "Je salis
tout", ou "Face à mon cadavre", relève d'un bon fond sombre.
Tandis que le bassiste-compositeur interprète "45 degrés
de haine", et rappelle les Sheriff. Stalingrad marque aussi des points
avec ses petits hymnes à la Génération Néant
que sont "Ne lâche rien", solidaire et motivant, ou "Les vieux punks
(finissent toujours par payer)" dont le vécu ne s'invente pas. Quand
l'hommage "Que va penser Eudeline de nous", les acides "Panier de crabes"
et "Où étiez-vous quand nous étions morts" font vignettes
aussi senties que sincères ; principes devenus trop rares en notre
époque virtuelle.
(*) "Les écrivains en costard-cravate",
210 pages, 13 € ; http://thierry-tuborg.nfrance.com
STALINGRAD live
"Que va penser Patrick Eudeline de nous
?" La question-hommage est sincère, et Stalingrad reprend d'ailleurs
"Planté comme un privé" du même. Elle reflète
un état d'esprit développé au fil du set : comment
jouer la musique à qui l'on doit tout, en racontant des choses d'aujourd'hui,
sans faire comme si l'on était toujours en 1977 ?
Thierry Tuborg, l'auteur-interprète
d'origine bordelaise, a plusieurs réponses. D'abord, il se souvient
évidemment de son Stalag 70's historique, en deux titres. Et rappelle
au fanzine "L'oreille cassée" qui l'interviewe, que bien des
textes récents (ou écrits au fil du temps), prennent aujourd'hui
plus de sens encore, dans "L'anarchy en Sarkozie" ; comme chez NTM ou Bérurier
Noir. Ensuite, s'il chante "Euthanasie" des Olivensteins ou reprend toujours
les Stooges, on apprécie Ronnie Bird en version dynamitée,
fluide. Mais ce sont ses propres titres qui taquinent le mieux. Le refrain
"45 degrés de haine" se retient, ainsi que leur nouvelle scie, "Les
vieux punks finissent toujours par payer", on ne peut plus près
du sujet.
Enfin, les Stalingrad ne se déguisent
pas. Aux côtés du chanteur qui s'agite speed, on voit bien
que Thierry Saltet à la basse Epiphone altière, aux choeurs
et à la composition, est un sacré personnage. Un regard de
tueur lorsqu'il joue, un passionné qui se voue au big bad beat depuis
toujours (*). Le quatuor de Montpellier a sa cohérence, un son assuré
et d'évidence, du jus pour la suite, puisqu'après son CD-6
titres inaugural, il prépare un album.
(*) que de souvenirs si ce
n'est communs, parallèles ! Tous ces Vonn, OTH, Provisoires, Vierges,
Sheriff, suivis sur vinyles, live et autres... Idem dans "Prenez-en
de la haine !" du même, on croirait reconnaître un à
un les personnages de son roman noir rock & roll, Jauni Malaria et
sa deblond en tête (jusqu'au matelas qui crame...) ; conclusion :
les living dead rockers se réincarnent toujours !
+ Mont-de-Marsan
punk festival (par Thierry Saltet)
A LA TIENNE, THIERRY TUBORG !
Tuborg est le vrai nom de ce jurassik
punk, descendant des fameux brasseurs... Bordelais d'origine, basé
à Montpellier, il concocte de nouvelles chansons après les
années Stalag. Et publie des volumes comme on les aime : sincères
dans le ton, efficaces dans la forme : qui a dit rock-style ?
"-Lis-ça avant le concert de Stalag,
c'est un peu écrit comme "Mort aux Ramones", tu vas aimer !" Un
Straw Dog me faisait découvrir Thierry Tuborg, juste avant le festival
Bordeaux Rock. En moins phénoménal destroy que le faux-frère,
évidemment, mais le ton de pur vécu/pure vérité,
ne m'a pas moins immédiatement ému. Toutes ses anecdotes
ressemblaient à celles du Havre, de Rouen ou du vieux Nice du renouveau
70's ; avec ici le chanteur de Strychnine au bahut, avant la formation
du band, et Cantat à la fin, juste avant celle du sien... Et cette
clique de Hell's en Harley qu'il décrivait, la même trentaine
de Huns (ça ne s'invente pas !) qui débarqueraient au Luxor...
comme au Bar Des Cours de légende locale : bières, joints,
rock & roll.
D'ailleurs, l'acidité de son morceau
compilé, "Dernier cri", ramenait mentalement aux années Olivensteins...
Etrange piqûre de rappel. Rare impression aussi de découvrir
un auteur dont on sent tout de suite l'évidence. Qui plus est, au
moment où le gars à crinière blanche, se roule en
marcel sur la scène de Barbey... Avant de publier ce mois-ci au
Serpent à Plumes "L'affaire Sotomayor", après plusieurs
volumes faits tout seul avec son Cercle Seborrhéique. Qu'on a bouquiné
en rafale.
"Les années Stalag", donc.
Tout un chacun ayant joyeusement suivi le quotidien des groupes, à
partir de 76/77, a connu son lot d'anecdotes nickelées et de flamboyance
; mais peu ont eu l'occasion de les raconter de l'intérieur... La
gueule de l'emploi et un bon instrument qui garantissent le rôle.
Lignée bordelaise de groupes en St. Qui destroye les baies vitrées
de la cité U. Envoie ses factures à une adresse parentale
obsolète. Tremplin du Golf Drouot, mariage chez Roda-Gil, mais la
thune qui manque pour le retour. Rencontre avec Higelin qui gobe la lune,
saint-Sylvestre à Castéja. Pas loin de ce parcmètre,
le second, que les Stalag attaquent benoîtement à la scie
à métaux... presqu'en face dudit commissariat ! Cet excellent
genre. Tuborg Stardust. "Le danger, avec le fait d'écrire punk,
de chanter/jouer punk et d'amorcer une carrière artistique dans
ce contexte no futuresque, c'est l'excès d'identification...",
défonces et cicatrices ouvertes comprises. L'amitié dans
le gang (avec manager svp), le coeur des biches, et toute une provoc d'époque.
La sincérité de fond, ainsi
que le ton de saga personnelle qu'il a pareillement mis dans ses "Premières
gymnopédies", réjouissent ! Le gamin est bon en français,
mais ça coince à la maison, "si j'avais le malheur d'accueillir
une amie dans ma chambre, c'est tout juste si mon père n'exigeait
pas de se faire une idée de la libido de son fils... Me préserver
de tout contact familial a toujours contribué à mon équilibre
et appétit de vie. Mon père, le seul être humain à
avoir par trois fois lancé les flics à mes trousses..."
Car bien sûr, il fugue. Tombe sur
un couple d'éthéromanes. Fait le roadie pour Lou Reed. Résultat,
émancipé à 16 ans : "cannabis, partenaire officiel
de mes années 70... Sans autre famille que mon groupe de punk-rock
et les éducateurs sociaux". Direction Amsterdam pour acheter
et ensuite revendre. "Tradition, qui confectionnait le joint ne l'entamait
pas, mais le tendait à l'autre ; un petit calumet de la paix".
Sauf que les musiciens de Can lui font trimbaler un bloc de 300 gr, et
le laissent seul se dépatouiller à la douane. Direction neuf
semaines de détention en ex-RDA, "l'équivalent des vacances
scolaires d'été. Kick (le Strychnine chanteur) m'écrivait
les démarches pour un avocat bordelais, sa soeur fricotant avec
un membre de la pègre..."
Ce qu'on aime dans ses bouquins, c'est
l'humain. Qui fredonne un air pour se réconforter, ou se met Thunders.
Qui sait bien que les chats ont leur sourire. Qui garde son âme d'adolescent.
"Etait-il
si astronomique d'imaginer un métier passionnant ?" Freak brother
et rebel rebel quoi ! Parce qu'il y a aussi chez Tuborg des critiques senties
du système, les notes d'un humour jamais forcé, ainsi qu'une
capacité à surprendre le lecteur par quelques volte-face
bien perso. Une mémoire enfin, capable de restituer à cent
pour cent le vécu, sa limpide vérité. Ou bien qui
confère à ses ouvrages romanesques, une belle lucidité
populaire (*).
Réfugié dans la pinède
de Lacanau, l'animateur de "La Dune aux chats" a du feeling sauvagement
solitaire. Et développe une "petite philosophie cioranique", entre
la protection de ses félidés et la rencontre d'une jeune
eurasienne.
"Danza Caracteristica" rythme un romantisme pas gnagnan,
entre un prof de musique aveugle (qui recouvre la vue grâce aux techniques
modernes) et une jeune réfugiée haïtienne. L' inspiration
de ces deux-là remonte au milieu des 90's.
Depuis, son écriture sans fioriture
est devenue plus critique socialement, avec un sens affirmé des
dénonciations. Dans "Un bleu baléare", un auteur alcoolo
doit pondre un pamphlet contre un illustre intello. L'occase d'une charge
féroce contre les formateurs d'opinion. "L'élite, n'avions-nous
pas remarqué, éprouvait tant d'aversion pour le mot social
que dans la bouche de ses membres, il se prononçait sociétal,
tout comme libre se disait libéral". "La psychotronique pour
tous" soutient un rythme haletant chez le hacker killer. Qui connaît
aussi bien le Web que l'âme humaine. "... si la majorité
des hommes que la pauvreté et la contrainte aliènent, apprenait
à réfléchir par elle-même, elle s'apercevrait
alors bien vite que la minorité privilégiée n'a pas
la moindre légitimité, plus la moindre autorité, et
l'éliminerait au lieu de persister à la servir dans la crainte,
la honte, le désarroi et le sang".
Ainsi, ses héros le dévoilent
parfois "... tenter de comprendre comment les autres pouvaient en arriver
à se soumettre et à se résigner à ce point,
alors que je n'y parvenais pas, n'y parviendrais sans doute pas. C'était
l'énigme"... Ou le motivant secret !
(*) à commander via
le http://thierry-tuborg.nfrance.com
(épuisés, "Même pas mal !", "Même pas peur !",
compilent son journal toujours en ligne, démarré bien avant
la vogue du blog)
"L'affaire Sotomayor" se lit comme une
"Brigade Mondaine" -j'en ai dévoré à une époque...-
sans les ficelles, mais avec au contraire des astuces de narration et du
vécu pas gratuit en plus.
Le truc de l'auteur, c'est de raconter
chaque chapitre à la première personne, d'en distiller ainsi
le plus intime ressenti. Celui de Rebecca, "morte depuis que mon père
me viole depuis mes 12 ans". S'agit de Manuel Sotomayor, producteur quadra,
winner du ciné et des pages people. Un jurassic punk va recueillir
les confidences de sa fille, avant d'étrangler celle "qui avait
naturellement ce que la plupart se fabriquaient, le visage et les cheveux
d'un ange" ; et vient de subir une tournante avec le pater et ses assistants.
Entrent en scène la mère
délaissée qui veut une explication (et se fait suicider)
; un journaliste dupe et aux ordres, qui veut surfer sur la vague de l'opinion
; le metteur en son qui balance son violeur et meurtrier de réalisateur.
Ca semble se terminer par une apothéose en direct, de baudruche
dégonflée en prime-time, dont est témoin Tuborg lui-même.
Et ça balance entre les lignes,
sur le temps et ses moeurs ; sans manquer de détails/vérités
du quotidien, et de petits clins d'oeil (la standardiste Gabba-Gabba-Hey,
un vers de Bowie), qui nous font dire qu'un romancier comme ça,
on y croit. |
"Si tu savais le nombre de témoignages
de lecteurs et trices accros à mon journal publié en direct
!"
-Je l'imagine volontiers... Qu’as-tu
pensé des groupes que tu as pu voir à Bordeaux
rock ?
Thierry Tuborg : Barbey était bondé,
souviens-toi, plein à craquer, ils ont dû laisser entrer davantage
que convenu, c’était incroyable ! Résultat, nous ne pouvions
pas tellement bouger. Je suis parvenu à me frayer un chemin jusque
devant la scène pour Standards, parce que notre bassiste Beber est
aussi le leur et que j’aime bien avoir l’occasion de voir Beber sur scène,
il est tordant comme garçon. J’ai aimé, Philippe Jolly est
toujours aussi dingue. Ah ! Oui, je me souviens avoir également
assisté à l’ouverture des hostilités par certains
Scarzello & Lys, très rock’n’roll classieux, mais j’aimerais
bien avoir l’occasion de les voir accompagnés d’un véritable
groupe assez sauvage.
-Des anecdotes...
À l’issue de notre unique répétition
sur les lieux même, le samedi après-midi, je suis allé
à la rencontre de Gérard, le bassiste de Stilettos, à
qui je devais rendre des comptes depuis tout ce temps : j’avais quitté
Bordeaux en 1982 en embarquant une guitare qu’il m’avait si gentiment prêtée
(nous travaillions des chansons ensemble). J’étais dans mes petits
souliers, tu peux me croire. Je lui ai remis un enveloppe avec de la thune,
et l’ai humblement prié de me pardonner cette connerie de jeune
punk. Gérard m’a affirmé que s’il était tombé
sur moi à cette époque, il m’aurait fait cracher mes dents.
J’ai dit que je comprenais, que le Thierry d’aujourd’hui était revenu
pour tenter de réparer toutes les bêtises du Thierry d’alors.
Il y avait du boulot, et du reste je ne me souvenais pas de tout.
Tu sais, je n’avais pas remis les pieds
sur Bordeaux depuis 23 ans. Chaque minute de ce samedi 22 janvier 2005
me procurait un incroyable flash, une montée d’adrénaline,
un choc cérébral, au gré des visages qui apparaissaient,
des retrouvailles, des interrogations (« Qui peut-il bien être
? »).
Et j’ai appris lors de cette soirée-là,
compte tenu que Stalag a joué à minuit et demie, que j’étais
désormais capable de résister à la tentation de boire
ou de me défoncer avant d’entrer sur scène y compris durant
plus de trois heures d’attente, livré à moi-même dans
une soirée rock. La sagesse du vieux punk. Les autres Stalag n’en
revenaient pas !
-Et Stalingrad ?
Stalingrad est donc mon groupe actuel,
depuis l’été 2004, à Montpellier. C’est du punk rock
77, du Stalag puissance 1 000, influences Stooges/Ramones, textes en français.
Nous reprenons deux titres de Stalag, Coupables qui sera sur le disque
et Carolus d’Or uniquement pour la scène. Notre mini-album sortira
vers octobre, chez Be Fast et Julie Records (Julie a produit Freddy Lynxx,
Jeff Dahl, Kevin K…). J’aurais préféré sortir le disque
au printemps, en même temps que mon livre au Serpent à Plumes,
mais la production a besoin de temps pour mettre en place la tournée
promo, donc automne. Nous avons enregistré début janvier,
nous sommes sur les nerfs, et allons sans doute faire quelques concerts
d’ici l’été histoire de nous défouler. Bien entendu,
j’adorerais que nous jouions sur Bordeaux, à bon entendeur salut
!
-Ce EP inédit de Stalag, que
représente-t-il exactement ?
Notre 45 tours d’origine, Date Limite de
Vente, sorti en 1981, s’échange aujourd’hui autour de 90 euros.
Ça a fini par nous casser sérieusement les couilles, ce business
de collectionneurs sur notre dos. Tungstène et moi avions commencé
par lancer des CD de Stalag, en Do It Yourself, aux alentours de 6 euros,
mais ce n’était pas top. Alors mon label actuel, Be Fast, s’est
mis sur le coup pour sortir à un prix honnête ce EP vinyl
4 titres (Dernier Cri, Carolus d’Or, Sauf nécessité, Les
Fusils). Ils ont remasterisé les titres, c’est du bon boulot, et
la pochette est assez chouette. On peut se le procurer directement par
moi, d’un coup de mail (thierrytuborg@aol.com), en attendant que la distribution
soit effective. Je pense que sur Bordeaux, Montpellier et Paris, il n’y
aura pas trop de problème.
-Tu tenais ton journal bien avant
que le blog soit à la mode ; c’est une activité quotidienne,
nécessaire, complémentaire, un contre-point entre des histoires
inventées et des récits biographiques ?
J’ai entamé la rédaction
de mon Journal Perso en 1995, c’est donc la dixième année,
là. Il est mis à jour en direct sur mon site internet (http://thierry-tubog.nfrance.com).
C’est une sorte de digression indispensable à l’écriture
de mes fictions, le besoin de décrire le plus fidèlement
possible ce que je vis, ce que j’éprouve dans la vraie vie. Et puis
ça devient un petit témoignage ethnologique : l’évolution
de l’état d’esprit d’un vieux punk au fil des ans, des événements.
En 1995, on peut lire mes galères avec les éditeurs, mon
côté sombre, mes tentations de me supprimer. Quelques années
plus loin, on découvre un Thierry Tuborg euphorique qui ouvre Le
Cercle Séborrhéique et se réalise enfin ! C’est une
bonne illustration de l’existence, de la ténacité. Le titre
de La Grande Sophie Du courage, ça va très bien avec mon
Journal Perso.
-Aimerais-tu qu’il soit finalement
(ré)édité ?
C’est une bonne chose qu’il soit en libre
consultation sur mon site ! Si tu savais le nombre de témoignages
de lecteurs et trices accros à mon journal publié en direct
! Toutes ces personnes y puisent quelque espoir, quelque force, quelque
joie… J’ai une lectrice devenue amie (la bise, Daphné !), une vraie
fan qui a acheté tous mes livres en plusieurs exemplaires, qui se
connecte tous les jours, et qui travaille dans la réinsertion des
jeunes en difficulté. Elle sait quel est mon passé, que je
suis issu moi-même de cette galère socio-éducative,
après l’émancipation et la taule à 16 ans etc., et
elle me dit qu’elle cite souvent à ses jeunes l’exemple de l’ex-petite
frappe que je suis !
J’avais commencé à publier
au Cercle Séborrhéique le premier tome de ce journal (Même
pas mal !…), mais il est définitivement épuisé, c’est
trop cher à fabriquer par rapport aux ventes, compte tenu que le
Journal Perso est en libre consultation sur mon site. Oui, il faudrait
qu’un gros éditeur accepte de le distribuer, mais ça pourrait
signifier l’arrêt de sa publication en direct sur le Net. Faut voir.
-Au Serpent à Plumes, quelles
transformations a connu "L’Affaire Sotomayor" ?
La plus grosse correction, c’est la fin
du roman. Le directeur de collection, Daniel Picouly, m’a pris complètement
en défaut sur cette fin : « Écoute Tuborg ! Tu écris
un roman noir, et tu nous colles un happy end ! D’accord, on est tous avec
toi, ce salaud, il faudrait qu’il crève, on aurait tous envie de
le tuer… Mais dans le roman noir, c’est autre chose, mon garçon
! Les salauds s’en sortent, pas de happy end ! C’est ça, le vrai
noir… » Dont acte, j’ai modifié la fin. En revanche, j’ai
dû batailler ferme lorsque ses autres corrections ne me convainquaient
pas du tout.
-Quel a été le déclic
pour eux ; les autres projets ?
Ma rencontre avec cet éditeur est
assez insolite : un de mes lecteurs qui écrit également était
en négociation avec le responsable de cette collection, et, va savoir
ce qui lui a pris, il lui a fait passer quelques-uns de mes romans qu’il
avait chez lui. Le lendemain, ce responsable m’appelait afin de faire connaissance.
Depuis, il a zappé le garçon en question et m’a signé
deux titres (L’Affaire Sotomayor, donc, qui sort ce 17 mars, et Psychotronique,
mode d’emploi, qui sortira en 2006). Je précise que je n’avais rien
demandé, ne proposant plus mes manuscrits aux éditeurs depuis
deux ans. Il ne s’agit pas d’un aboutissement, ils veulent me spécialiser
dans le noir alors qu’il ne s’agit que d’une partie marginale de ma production.
Cela dit, j’aurais été stupide de ne pas donner suite. Un
peu de fraîche qui rentre, au moins.
Je continue l’aventure avec Le Cercle
Séborrhéique, bien entendu ! Le Serpent à Plumes n’a
pas l’intention de me signer tout et « n’importe quoi ». D’ailleurs,
à l’heure où je vous parle, je ne pense pas qu’un autre de
mes romans « généralistes » les intéresse.
-Où en est ce volume sur un
écrivain qui, façon Rock’n roll Swindle, dynamite le milieu...
Le roman que je suis en train de terminer,
Les écrivains en costard-cravate, n’est semble-t-il ni pour eux,
ni pour un autre éditeur traditionnel, étant donné
son contenu (c’est un peu la transposition de La grande escroquerie du
rock’n’roll dans le milieu littéraire). Il finira sans nul doute
au Cercle Séborrhéique, comme au bon vieux temps (normalement
fin 2006). Mais peut-être, fort de mon entrée en librairie
avec L’Affaire Sotomayor et Psychotronique, mode d’emploi l’an prochain,
et sous réserves d’un bon accueil des lecteurs, serai-je davantage
en position de faire signer des bons romans comme La Dune aux chats, Premières
gymnopédies et Un bleu baléare chez un autre éditeur.
-Tu avais démarché
les éditeurs auparavant, peux-tu revenir là-dessus ?
J’ai reçu quelques marques d’encouragement,
notamment de la part d’Yves Berger et de Christian Bobin, dans les années
90. Mais il faut se rendre à l’évidence : le milieu de l’édition
traditionnelle t’est complètement fermé si tu n’es pas du
sérail. C’est un milieu pas vraiment rock’n’roll, très hypocrite,
composé de snobs et de petits-bourgeois obscurantistes, y compris
dans la partie « rebelle » de l’édition française.
Rebelles ? Rebelles d’opérette, oui ! Aristocrates un peu fripons
sur les bords, rien que des petits branchouillards laqués et maquillés
comme des voitures volées, qui placent leur insolence et leur audace
dans le sexe, le leur, leur petite superstar de bistouquette, et qui ignorent
tout des véritables préoccupations de leurs contemporains.
Ne me reviennent pas automatiquement,
là, des anecdotes particulières, pour tout dire je me suis
empressé de zapper cette sale période de mon existence lorsque
j’ai créé Le Cercle Séborrhéique, mais on peut
se référer aux pages de 1995 à 2000 de mon Journal
Perso, sur mon site internet, pour tomber sur des épisodes vécus
à cette période.
-Et Montpellier ?
Montpellier, c’est le fief des légendaires
OTH et Shériff. A Montpeul’ comme dans n’importe quelle autre ville,
de nos jours, ce sont des centaines de groupes de rock qui jouent dans
des dizaines de petites salles ou dans des bars, il y a des concerts quasiment
chaque soir. Si mon groupe Stalingrad est parvenu à obtenir un label
pour notre disque aussi facilement, c’est eu égard à mon
passé dans Stalag et à celui de notre bassiste Thierry «
Punky » Saltet dans La Déconnection, et grâce au fait
qu’un éditeur sort un de mes livres ce mois-ci en national. Car
pour la plupart des autres groupes de rock, ici, c’est la grosse galère
pour parvenir à s’imposer, se faire remarquer, tourner, enregistrer.
Il faut vraiment avoir un charisme incroyable, en plus d’être bon,
bien entendu.
Stalag, "Dernier cri" (Mémoire
Neuve)
Depuis que j'ai foulé les pavés
bordelais, les échos de la légende Stalag n'ont guère
cessé... Troisième décennie plus tard, via 15 titres
studio et live, des fans reconstituent l'album 33 tours que le band n'a
pu graver, durant ses années 1978-82 d'existence. On retrouve la
voix qui aboie et roule les "r" (à la Johnny Le Pourri) avec du
charme perso, ainsi que les mots et thèmes de Thierry Tuborg (de
son vrai nom).
Son acidité a perduré au
fil du temps : ses books sonnent tous vraiment rock'n'roll, et son nouveau
Stalingrad from Montpellier, en activité high energy... Les titres
vintage (cf. l'influence vocale de Strychnine sur "Interdit aux moins de
18 ans") sont autant de hauts le coeur adolescents, des tranches de "Marche
ou crève" en dents de scie : frustration, larmes, ennui, clashes
relationnels, véhémence never mind, clivages province/Paris,
fun aussi. Une histoire de rebelles. De petits punks français de
la fin 70's. Qui ont droit à ce vinyle documentaire à la
patine empoisonnée... comme certaines putains de vérités
qu'à 17 ans déjà, on savait.
|